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Edito

L’effet boomerang

Depuis ses débuts, Culture clown tente de saisir le clown contemporain sur quatre terrains où il se développe : la formation, la création, l’intervention sociale et l’interculturel. La plupart de nos dossiers couvrent ces quatre champs de pratiques. A contrario, certains numéros sont ciblés sur un seul. Ce fut le cas avec le N°7 ("l’intervention sociale des clowns") et le N°9 ("clown et création"), et c’est le cas ici avec ce dossier "clown et formation". Déjà ce titre porte un vrai paradoxe. D’une certaine façon, l’essence même du clown - non-conforme, non-formaté - inciterait plutôt à parler de déformation tant il est vrai qu’incarner un clown demande de changer de forme ! En fait, le travail du clown invite à s’ouvrir au jeu, à se mettre en jeu, ce qui passe par une trans-formation !

Mais de quelle formation parlons-nous ? La première partie du dossier s’intéresse à la "formation DE clowns" quand il s’agit de devenir clown (au théâtre, au cirque, à l’hôpital...), ce qui passe par un engagement de l’acteur dans une expérience singulière, créative et exigeante. La seconde partie concerne la "formation PAR le clown" quand la pratique du clown représente un passage (d)étonnant lors d’une formation professionnelle ou personnelle (à l’Université, dans les écoles d’infirmiers ou de travailleurs sociaux, dans les grandes écoles, les entreprises... ou les établissements pour personnes handicapées mentales).
Ce dossier donne surtout la parole aux "formateurs", ces passeurs qui organisent et accompagnent l’expérience clownesque,. mais la parole des "formés" y est présente comme témoignages recueillis par les premiers ou placés en parallèle. Au delà des effets attendus dans toute activité d’expression, leurs propos tentent d’éclairer ce que l’effet clown a de profondément spécifique.

Finalement, quelque soit le cadre de ce cheminement avec et vers le clown, un même processus est engagé que nous appellerons l’effet boomerang. Se lancer dans le clown, c’est se confronter au retour du clown en soi. Encore faut-il le lâcher ! L’entrée dans le masque nous propulse dans un voyage vers l’être clown qui nous ramène à nous-même : le nez rouge entre en nous ! Le retour du boomerang met en cause nos conformismes et nous ouvre à l’authenticité de la présence. L’énergie du jeu vers l’extérieur nous branche à l’intérieur.
Il s’agit alors de bien ajuster notre lancer pour qu’il revienne au cœur de notre humanité. Ni le perdre loin de nous dans une forme de clown stéréotypée, ni se prendre un retour destructeur sur la tronche ! D’où l’importance des conditions de la mise en jeu. Alors découvrez dans ce numéro estival les règles du jeu du clown boomerang !