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Une affaire collective et sociale

parGilles Allaire(INRA) - texte mis en forme par Bertil Sylvander

Pour éclairer les notions "amateur" et "professionnel", nous avons demandé à un chercheur son point de vue sur une question qui se pose quand, par exemple, une structure veut recruter un acteur clown pour un spectacle ou pour intervenir à l’hôpital…

En gestion des ressources humaines, on pose la question en termes d’offre et de demande, par rapport à un profil de poste. On examine alors les compétences d’un candidat par rapport à ce poste. On peut aller plus loin en examinant comment le candidat peut contribuer aux objectifs de l’entreprise et poser la question de ses capacités ou de ses aptitudes à remplir la fonction qu’on lui demande.
Néanmoins, cette approche strictement individuelle ne peut être satisfaisante par rapport à une profession au sein de laquelle on souhaite établir des critères de professionnalisme. Dans ces conditions le terme "amateur" a une connotation négative (il laisse supposer que la personne en question n’apporte pas grand soin à la réalisation de la tâche qui lui est confiée), alors qu’au contraire, le mot "professionnel" indique une bonne maîtrise des compétences.
Dans beaucoup de professions (celle du théâtre comme d’autres), c’est au niveau des pratiques sociales et même du contrôle social qu’on aborde la question. Dans ce cadre, un amateur peut être celui ou celle qui n’est pas relié sociale-ment à la profession des comédiens, par exemple, même si il en a par ailleurs toutes les compétences. Ce lien social peut avoir pour fonction, entre autres, de réguler collectivement les aptitudes des membres de la profession, en vue par exemple d’être à la hauteur des missions de la dite profession et de sauvegarder sa réputation.
Dans ces conditions, on a coutume de distinguer deux conditions qui vont concourir à cet objectif :

  • l’existence de références communes que la profession va élaborer et faire appliquer
  • un régime de responsabilité qui va permettre de vérifier que les missions de la profession sont respectées.

La réalisation de ces conditions peut revêtir de nombreuses formes : ordre professionnel (comme celui des médecins ou des avocats), accord sur un label de qualité, club, etc.. Ces formes se concrétisent par un lien ou un contrôle social qui peut aller jusqu’à la délivrance d’une licence1. Dans le domaine du théâtre, on peut penser à un registre, un accès aux subventions, aux aides techniques diverses, aux salles de spectacle, aux critiques, aux revues, etc...
Lorsqu’aucune forme n’existe et que la profession est complètement libre d’accès, la seule sanction se fait par rapport à l’individu et à sa capacité de se constituer seul une "clientèle". Elle se traduit alors, selon les résultats, par un niveau plus ou moins élevé de recettes et d’estime de soi, étant supposé que l’accès à cette clientèle est possible : trouver un local ou un directeur de salle qui accepte un comédien "amateur", etc… Et pour boucler la boucle, rappelons que la qualité du produit (spectacle) n’est pas forcément lié au statut de professionnel , ni dans un sens, ni dans l’autre !